Les Anges d'Elysium Tome 1 - Plume by Olivia Wildenstein

Auteur:Olivia Wildenstein [Inconnu(e)]
La langue: fra
Format: epub
Publié: 2020-10-13T00:00:00+00:00

33

— Il est venu me voir ce matin, dit Jarod en faisant tourbillonner le vin ambré dans le petit verre qu’un homme, vêtu d’un costume à queue de pie, venait juste de lui servir – un Château d’Yquiem.

Jarod fit tourner le vin dans sa bouche, puis il acquiesça.

Le sommelier remplit mon verre avant de rallonger celui de Jarod, et repartit en portant la bouteille aussi précautionneusement que s’il s’agissait d’un nouveau-né.

— Qui ça ? demandai-je.

Je pris mon verre et humai son contenu avec curiosité. De délicieuses notes de sucre et d’abricot confit s’échappaient de la surface. J’avalai une petite gorgée et ronronnai presque lorsque le nectar glissa sur ma langue.

Peut-être avais-je vraiment ronronné, d’ailleurs, puisque Jarod eut l’air encore plus complaisant.

— C’est bon ?

— Ambrosiaque, répondis-je.

Je bus une autre gorgée, puis me léchai les lèvres.

Le regard de Jarod s’attarda sur ma bouche avant de se diriger derrière moi, vers la tapisserie encadrée d’or représentant une tête de chou accompagnée de divers autres légumes.

Je reposai mon verre à côté de l’assiette, si finement ornée que sa place aurait été sur un mur plutôt que sur une table.

— Donc, tu disais que quelqu’un était venu te voir, repris-je.

— Exact.

Jarod s’éclaircit la voix et reporta son attention sur moi.

— Mon cher cousin est passé chez moi.

Je levai les sourcils. C’était donc pour ça qu’Asher était revenu à Paris. Je me redressai sur ma chaise.

— Qu’est-ce qu’il voulait ?

— Il voulait savoir quelles salades je t’avais racontées.

Mon pouls s’emballa, accélérant ma circulation sanguine et rendant mes membres presque vaporeux.

— Et que lui as-tu répondu ?

— La même chose que lorsqu’il a débarqué il y a sept ans.

Il s’appuya contre son dossier, tenant délicatement le verre de vin dont on aurait juré qu’il sortait tout droit d’un service de dînette entre ses doigts.

— Qu’elle est morte par ma faute, ajouta-t-il.

Mes os se figèrent.

— Mais c’est un mensonge ! Muriel m’a raconté ce qui s’était passé.

— Tu n’as jamais envisagé que Muriel puisse tisser une histoire pour me protéger ?

Est-ce que Muriel avait menti pour présenter Jarod sous un meilleur jour ? Avais-je mis paradis et enfer sens dessus dessous à cause d’un mensonge ?

Je remarquai une palpitation nerveuse au niveau de sa tempe.

Même s’il n’avait pas d’ailes, et donc pas de plumes à perdre en cas de mensonge, le mélange de douleur et de colère dans ses yeux me fit penser que l’histoire de Muriel était vraie. En plus, si elle avait tout inventé, elle n’aurait pas mis Jarod au milieu de la scène de crime. Elle l’aurait placé aussi loin que possible et ne l’aurait sûrement pas fait toucher l’arme.

— Une femme qui s’inquiète autant pour quelqu’un aurait inventé une meilleure histoire, dans laquelle le petit garçon qu’elle aimait ne serait pas dans la maison, à retirer le coupe-papier ensanglanté de la poitrine de sa mère…

Il pinça les lèvres.

— Et avant que tu essayes de me convaincre d’une autre manière, ajoutai-je, retirer une lame du cœur de quelqu’un n’a rien à voir avec le geste de l’y planter.

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